lundi 18 juin 2007

des tours et détours




C'est comme la potion magique pour Obélix: je suis tombé dedans quand j'étais petit."Le tour de France". Oh! je sais , les malins et les madrés d'un air entendu se diront: Le Tour, potion magique, bien sûr, Dopage...
Mais je fais partie de ceux qui chaque année, comme le buveur invétéré après chaque verre, annoncent : "cette année c'est fini. L'an dernier, j'ai été abattu par la fulgurante défaillance de Floid Landis, j'ai battu des deux mains à son exploit du lendemain qui lui a remis le maillot sur le dos.Et consterné par la révélation de son dopage." Et puis Riis, et Basso et Ullrich et tant d'autres, et le plus inadmissible, Lance Armstrong. J'ai été dupé par le dopé. A l'insu de mon plein gré.
Mais je sais qu'à l'approche des grandes étapes de montagne, une force magique me raménera devant mon petit écran. Avec mon plein consentement. Et je me dirai aencore que cette fois c'est bon, les compteurs ont été remis à zéro.
Les paysages les plus grandioses, des montagnes sous les brumes, des descentes vertigineuses sous la pluie, le Ventoux, désert infernal sous le soleil assomoir. L'invraisemblable charivari de la caravane , des motos , le gymkhana des vélos, le cliquetis des chaînes, le sourire du vainqueur, les larmes des attardés qui ne veulent pas mourir. Et les souvenirs qui se bousculent.
Il y a très longtemps, la vie d'avant la télé, les reportages "radio" , on entendait comme si on y était ...Et Roger Hassenforder ...Oui Roger Hassenforder franchit en vainqueur la ligne, les deux mains levées et un pied sur le guidon..juste avant l'assiette de yaourt avec des morceaux de pêche.Quel régal..
Mes premières images télévisées: la célèbre passe d'armes dans la montée du Puy de Dôme entre le grand méchant et le gentil, Anquetil et Poulidor, quand la france jouait déjà à être manichéénne.J'étais pour Poulidor mais je voulais qu'il gagne , quand même , à la fin! ( c'était l'époque où mon professeur de français de première,abandonnait de temps à autre Voltaire , Rousseau et le 18ème, pour se tourner en silence vers la fenêtre givrée des hivers valenciennois, le regard dans le vague et soudain s'écrait; " il n'y a rien de plus beau que l'effort grimaçant de Poulidor ou alors... la sécheresse des plans des films de Robert Bresson" Comme quoi, la littérature mène à tout.
J'ai quasiment oublié les années Merckx, Hinault, Indurain. Trop d'activités professionnelles. Et semble -t-il le début des tours ennuyeux. Et toujours le même vainqueur: au train dans la montagne, je limite les dégâts. Tout seul contre moi, je suis le meilleur.
Mon intérêt, comme celui pour le football, va revivre à travers les enfants. Et là , on va innover: on va aller les voir en vrai. D'abord timidement. Partant de Lille, on ira jusqu'aux alentours de Liège, en Belgique: un contre la montre individuel. Le jeu consiste à essayer d'entr'apercevoir àtravers les rangs compacts des spectateurs, chaque coureur passant environ toutes les trois minutes, le nez dans le guidon, les chaînes qui dans l'écrasante chaleur d'une canicule wallone chantent comme un vol de cigales.Le temps d'admirer la technique de mes garçons: l'un a le classement entre les mains, l'autre le chronomètre, on sait immédiatement qui a de l'avance sur qui; mieux informés qu'à la télé! La convivialité en plus.
Alors , on va faire mieux. De la famille installée à Grenoble, ce sera l'année suivante 1600 kms en cvoiture pour s'installer au matin dans le cormet de Roseland juste pour voir émerger du brouillard un Stéphane Heulot en Jaune ( qui connaît Monsieur Heulot?) suivi de tout le peloton. 45 secondes d'émerveillement. De plus, on sera rentré à Grenoble pour l'arrivée à la télé!.
Plus fort encore l'année suivante. Grenoble encore sur un week-end. Cette fois , les mythiques virages de l'Alpe d'Huez (il y en a 22). Il faut joindre à l'effort du monospace, l'effort physique:on se gare en bas de l'Alpe et on remonte pour être placé à l'endroit des "attaques". Neuf virages à monter à pied. Allégrement.Les couleurs, la caravane, les klaxons, les Grands, tous en tête, et c'est fini. On échange avec nos voisins néerlandais. Ils sont arrivés la veille et dorment dans leur caravane. On redescend, lentement, les jambes sont lourdes. On ne verra pas l'arrivée à la télé. Mais c'est encore plus beau. On échange avec des belges, des italiens, le tour 66, la victoire de Lemond avec huit secondes d'avance sur Fignon.Les garçons feront un écart et raconteront le "carrefour" de l'arbre, un jour de poussière, où pour la première fois venus sur une autre course que le tour, ils ont vu arriver, tel un archange noir, Andréi Tchmil lancé comme un train fou vers la victoire à Roubaix.
Ce sont les dernières gouttes de vraie croyance: les années "dopage de masse", professionnel sont là; personne ne peut plus fermer les yeux. Voici Festina, Virenque, et tous les autres. Le plus triste et douloureux, la mort de Pantani, le Pirate. Le plus cynique, l'impardonnable, parcequ'il a projeté sept ombres définitives sur le tour, abrité derrière sa résurrection? Lance Armstrong...Mais il est tard , Monsieur, il faut que je rentre . Mais demain, demain j'attendrai La Madeleine, on ira au Tourmalet, il n'y aura plus d'EPO, et la Madeleine, moi, j'aimerai ça!..








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